FLUCTUATION

Du 14 septembre au 25 octobre 2023, la galerie Espace VERRE présente FLUCTUATION, une exposition collective de huit artistes verriers issus de la relève. Pour souligner le 40e anniversaire du Centre des métiers du verre du Québec, désormais plus connu sous le nom d’Espace VERRE, c’est le thème de la mue qui a été retenu. Telle une métaphore vivante, la mue incarne la nature même de la transformation. Elle est le reflet de la capacité innée de la vie à se renouveler, à évoluer, à se réinventer. Dans le règne animal, la mue revêt une signification profonde, symbolisant la métamorphose physique et spirituelle qui guide chaque être vivant vers de nouveaux horizons. Dans le monde humain, la mue se manifeste sous différentes formes : la transition de l’enfance à l’âge adulte, les périodes de remise en question personnelle, voire les transformations sociétales qui bousculent nos repères établis. Elle nous rappelle que nous avons le pouvoir de nous défaire de nos fardeaux, de nos anciennes identités, pour embrasser le nouveau avec une vigueur renouvelée. La peur du changement cède la place à l’anticipation de l’inconnu, à la curiosité envers ce que l’avenir peut nous apporter. La fluctuation est ici envisagée sous l’angle de l’expression artistique dans le domaine des émotions humaines. Comme un tableau impressionniste, notre vie intérieure est peinte avec des nuances et des teintes variées, créant une mosaïque complexe de sentiments qui fluctuent sans cesse. Les artistes Pamela Boissonneault, Dorothée Bouliane, Dylan Duchet, Alexi Garneau, Charlie Larouche-Potvin, Sécrétion Féline, duo composé de Diane Champagnat-Becker et Nicolas Forlini, et Clément Vieira, proposent des œuvres engageant à la réflexion, au rêve et à l’interprétation dans une exposition saisissante.

Pour exprimer ses idées artistiques, Pamela Boissonneault utilise la technique de pâte de verre et de cire perdue qui lui permet de créer des œuvres en verre imprégnées de mystère tout en étant colorées et vivantes. Fascinée par l’étrangeté des films d’horreur du 20e siècle, elle en tire les éléments de corps déconstruits présents dans son travail. Percevant des critères humains tant physiologiques que psychologiques dans les technologies actuelles, elle s’en inspire pour proposer une vision de l’avenir de l’humanité, dans lequel le robot et l’humain feront partie d’une seule et même composition.

Transportée par la poésie et la narration, Dorothée Bouliane façonne la pâte de verre qui lui permet de dévoiler des mondes imaginaires présentés à travers son expérience personnelle et sa sensibilité.  À travers ses créations, l’artiste aborde l’étrangeté de l’existence humaine et le caractère relatif de nos perceptions. Elle s’interroge dans le cadre de cette exposition sur la difficulté qu’éprouve l’humain à apprendre de ses erreurs et sur son entêtement à s’engouffrer dans la consommation illimitée, nocive et destructrice. Les sociétés humaines sont la source de multiples découvertes scientifiques conduisant à des avancées technologiques, des évolutions positives qui pourtant ne profitent pas à toutes et tous.  Dorothée Bouliane nous offre sa représentation de la société moderne, remplie d’une douleur collective et corrompue par les aspects négatifs de ses transformations successives.

Dylan Duchet se dévoue à la technique du verre soufflé tout en intégrant la gravure à la roue et au jet de sable à son travail. Dans sa pratique artistique, il recherche le mouvement des paysages naturels et fusionne cette beauté brute à un style graphique de création. Des lignes abstraites trouvent refuge sur des objets en verre épurés. L’artiste présente une œuvre d’inspiration personnelle, symbolisant la laborieuse transformation de l’être complexe et angoissé aspirant à la paix de l’âme. L’imaginaire est ainsi mobilisé sur une ligne du temps prenant la forme du passage de tumultes intérieurs vers une sérénité convoitée.

La démarche artistique d’Alexi Garneau intègre la lumière et des esquisses dans le verre, faisant ressembler ses œuvres à des dessins en verre aux lignes élégantes et électriques. Que ce soit avec le borosilicate ou le néon, le contact physique avec le verre, lors de la création, lui donne plus de liberté, de finesse et de compréhension de la matière. S’inspirant d’une citation de l’écrivain Charles Bukowski « Vous devez mourir plusieurs fois avant de vivre réellement », le néoniste propose une interprétation fascinante des cycles de transformations des êtres humains. Mettant en scène une succession de morts métaphoriques et de renaissances lumineuses, il offre l’espoir de la délivrance, un chemin vers l’autre côté de cette ”mort de soi”, vers l’apaisement et de paix.

C’est par la fabrication de coupes inspirées des traditions vénitiennes que Charlie Larouche-Potvin a engagé sa conversation avec le verre. Des objets délicats, fabriqués depuis des siècles sur l’île de Murano, qui démontrent par la chorégraphie qu’exige leur création tous les caprices et toutes les vertus de la matière. Que ce soit en créant des pièces tirées d’un imaginaire fantastique ou en travaillant sur la précision technique d’objets plus épurés, il conçoit la confection de chaque objet comme un entretien avec le verre. L’artiste présente un récit fantasmagorique mettant en scène le poisson et le dragon, deux animaux traditionnels vénitiens. Dans ce récit, l’un se transforme en l’autre, atteignant ainsi, dans « un rugissement ardent, couvert d’or, un rugissement flamboyant s’envolant, échappant à l’amer déluge », un état de grâce et de libération.

Sécrétion Féline, duo formé de Diane Champagnat-Becker et Nicolas Forlini, explore les limites des structures sociales et politiques en y répondant par l’absurde. Les artistes, en regardant l’avenir se dessiner, ressentent la certitude des mutations des paysages sociaux, environnementaux, économiques et politiques. Artistes et citoyens, ils s’interrogent sur les enjeux liés à leur impact immédiat, alors que leur art se mêle aux questions fondamentales de demain, s’y entremêle et s’en démêle. L’installation de Sécrétion féline illustre leur réflexion en mettant en scène le corps social dans toute sa complexité et ce qu’il laisse derrière lui, à chaque étape de transformation.

Concevant le verre comme un langage, Clément Vieira ancre son travail dans un mélange européen et nord-américain. Il travaille le verre par citation d’éléments traditionnels, majoritairement du Moyen-Âge en utilisant des techniques variées.  L’artiste revient ici sur les «années Covid» , qui nous ont, à maints égards, profondément transformés. Le «quoi qu’il en coûte» et le «plus jamais ça» devaient être les fondations d’un monde nouveau. Le confinement rappelant à certains, et enseignant à d’autres, la vacuité de leurs existences, il y aurait définitivement un changement, une mue de nos sociétés. Cependant, privé de plaisir, le monde occidental est retourné à ses habitudes de consommation excessive. L’œuvre, une frise chronologique s’articulant autour de cives soufflées, révèle les moments clefs de l’évolution de nos sociétés.

Espace VERRE est un centre de formation et de diffusion des arts verriers situé au 1200 rue Mill, à Montréal. La galerie est ouverte du lundi au vendredi de 9 h à 17 h, et le dernier dimanche de chaque mois de 12 h à 17 h. L’entrée est gratuite.

Conception graphique : BERGER.studio

Source :

Marina Dobel, directrice générale

administration@espaceverre.qc.ca

514-933-6849